
Xavier Niel à l’US Créteil : quand les grands patrons redessinent la carte du football français
Xavier Niel et l’appétit des géants français pour le football
Après la famille Arnault au Paris FC et Alexandre Mulliez à Versailles, c’est au tour de Xavier Niel d’entrer sur le terrain. L’homme d’affaires, fondateur de Free et dirigeant de la holding NJJ, a annoncé être en négociations exclusives pour devenir l’actionnaire de référence de l’US Créteil-Lusitanos, club de Nationale 2 (4e division). Un mouvement qui illustre la montée en puissance des grands noms du capitalisme français dans le monde du sport, et plus particulièrement dans le football.
Un projet ambitieux, ancré dans une histoire personnelle
- Xavier Niel ne se lance pas au hasard. Originaire de Créteil, il justifie son engagement par un souhait de “rendre à cette ville un peu de ce qu’elle (lui) a donné”. À travers NJJ Holding, il prévoit la création d’un centre de formation et l’arrivée de nouveaux partenaires pour structurer et professionnaliser le club. Le propriétaire actuel, Tony Al-Homsi, restera minoritaire pour assurer la transition.
- Au-delà de la dimension sentimentale, il assure que le football peut devenir un vecteur d’impact local, d’image et de développement économique à long terme.
Une tendance qui se confirme en Île-de-France
- L’investissement de Xavier Niel s’inscrit dans une dynamique plus large. À Versailles, Alexandre Mulliez — petit-fils du fondateur d’Auchan — et le pilote de F1 Pierre Gasly s’emploient à faire du FC Versailles un club professionnel structuré, porté par une vision long terme et un modèle de gestion inspiré du “lean management”. De son côté, la famille Arnault, via la holding Agache, s’est récemment alliée à Red Bull pour prendre le contrôle du Paris FC, avec pour objectif affiché de hisser le club en Europe suite à leur promotion toute récente en Ligue 1.
- Ces initiatives convergent vers un même constat : la région parisienne regorge de talents sportifs, mais souffre d’un déficit historique d’alternatives solides au PSG. En diversifiant leurs investissements vers des clubs en devenir, ces entrepreneurs cherchent à combler ce vide… tout en capitalisant sur le potentiel inexploité du bassin francilien.
Un levier stratégique pour les grandes fortunes
- Ce regain d’intérêt pour le football n’est pas uniquement émotionnel ou philanthropique. Il traduit une logique plus large de diversification patrimoniale et de rayonnement des marques. À l’instar du groupe LVMH, de plus en plus présent dans les grands événements sportifs (JO de Paris, Formule 1), le football devient un territoire stratégique pour les leaders économiques désireux de conjuguer impact sociétal, visibilité médiatique et valorisation d’actifs.
- Même si ces projets restent modestes à l’échelle des fortunes en jeu, leur effet structurant peut être considérable : meilleure formation des jeunes, professionnalisation des structures, partenariats innovants… Et à moyen terme, une montée en gamme du football français dans son ensemble.
Un secteur sous tension
- L’initiative de Xavier Niel, comme celles des Arnault ou des Mulliez, résonne tout particulièrement dans un contexte de fragilité croissante du football professionnel français. D’après une étude menée par le cabinet Accuracy pour le syndicat Foot Unis, la filière représente pourtant près de 40 000 emplois et 5,3 milliards d’euros de valeur ajoutée. Les retombées fiscales sont elles aussi significatives, à hauteur de 1,2 milliard d’euros par an.
- Pourtant, de nombreux clubs peinent à maintenir leur équilibre financier, fragilisés par la baisse des droits TV et la pression fiscale. La défaillance soudaine de Mediapro en 2020 a brutalement fait chuter les revenus issus des droits TV, plongeant une majorité de clubs français dans une crise durable qu’ils n’avaient pas anticipée. Cette instabilité est ravivée aujourd’hui par des contentieux encore en cours. Dans le même temps, l’arrêt Diarra de la Cour de justice de l’UE remet en cause le principe même des transferts, pilier du modèle économique actuel des clubs. Le rapport alerte sur le fait que « la plupart des clubs sont en danger » et appelle à une revalorisation de l’image du football.
- Dans ce contexte, l’arrivée d’entrepreneurs visionnaires, capables de conjuguer ancrage local, structuration économique et ambition de rentabilité, peut être perçue comme un signal positif. Elle redonne à ces clubs un cap stratégique, tout en contribuant à la redynamisation des territoires. Le football, bien au-delà du spectacle, s’impose de plus en plus comme un acteur économique majeur, à ne pas sous-estimer.
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